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Les quartiers ont du talent - Design & stratégie pour activer le changement

Publié le 5 mai 2017 Mis à jour le 11 février 2019
le 18 mai 2017
 

Université Toulouse Jean Jaurès
Jeudi 18 mai 2017 - Amphithéâtre 3
Bâtiment Olympe de Gouges

Journée d'étude




Outre la crise économique et le chômage qui rongent la société française, le socle commun supposé fonder notre sentiment d’appartenance à la France est très malmené, et la confiance entre ses membres très abîmée. De nombreux
quartiers, économiquement pauvres, ont longtemps été abandonnés à leur sort dans une relative indiérence jusqu’à ce que quelques jeunes issus de ces quartiers, dans un geste suicidaire et meurtrier d’une spectaculaire détermination,
ne détruisent des symboles de la France dite d’en haut, condamnant du même coup ces quartiers, sa population, et la religion musulmane à en porter le fardeau et l’entière responsabilité.

Mais comme le chante le rappeur Kerry James dans un extrait du documentaire À voix haute, réalisé par Stéphane Freitas : “On n’est pas condamnés à l’échec, banlieusards, fiers de l’être, j’ai écrit l’hymne des battants parce que la vie est un combat pour ceux d’en haut comme pour ceux d’en bas. Ce sera pour ceux qui rêvent d’une France unifiée, parce qu’à ce jour il y a deux France qui peut le nier et moi, je suis de la deuxième France, celle de l’insécurité, des terroristes potentiels, des assistés, c’est ce qu’ils attendent de nous, mais j’ai d’autres projets qu’ils retiennent ça. Je ne suis pas une victime mais un soldat. Regarde-moi, noir et fier de l’être. Je manie la langue de Molière, j’en  maîtrise les lettres. On n’est pas condamnés à l’échec. Si le savoir est une arme, soyons armés. Car sans lui nous sommes désarmés”.

Ce sont précisément les leviers ou ferments visant à recréer du lien social entre les diérents milieux sociaux que cette journée cherchera à identifier et à questionner. Si le langage est un vecteur d’information sur les origines et la
personnalité de chacun et qu’il peut rapidement se trouver disqualifiant, le documentaire À voix haute ne montre-t-il pas qu’il peut se révéler un moyen extrêmement ecace de nous rassembler ? Serions-nous capable aujourd’hui,
d’inventer un mi-lieu, c’est-à-dire un lieu de réciprocité où les codes sociaux pourraient se parler, se transmettre, s’échanger.

Comme le suggère Françoise Ferrand, responsable pendant sept années des universités populaires du mouvement ATD Quart Monde, le préalable devrait d’abord consolider le pouvoir de ceux qui possèdent un autre type de savoir,
issu de la vie ou de l’action. “Au sein des universités populaires animées par ATD Quart Monde, nous manifestons cette volonté en donnant la priorité de parole à celles et ceux qui vivent dans ce quartier.” Car qui mieux que les
personnes qui vivent dans un quartier pour enseigner et innover ?

C’est probablement ce qui sous-tend la proposition du philosophe et militant Miguel Benasayag, pour lequel il serait souhaitable de co-fonder des espaces communs du non-savoir où l’expérience de l’un et de l’autre se forgerait au coeur de ces non-savoirs partagés. D’ailleurs n’est-ce pas ce préalable qui assure la réussite de la “méthode des cercles” ? En Israël, le Mouvement Arvout (garantie mutuelle) a initié ce dispositif afin de travailler à la paix.
L'idée est de rassembler quelques personnes, souvent de parfaits inconnus, voire des ennemis et de les inviter à s'asseoir en cercle et à participer à une discussion. La discussion se déroule selon quelques règles simples, mais d'une importance cruciale, et les résultats sont étonnants. En moins d’une heure d’échange, méfiance et hostilité s’évanouissent pour laisser la place à des discussions constructives.

Nourris des regards, des perspectives et retours d’expériences croisés, la finalité de cette journée aura pour visée de questionner les périmètres d’action possible pour forger un design propice à l’expression des talents et des savoirs. Dans sa vocation à concevoir, à imaginer, à inspirer, à faciliter, à transformer les activités humaines, les relations inter-humaines ou encore les relations que les humains entretiennent avec leur milieu, il importe d’engager des  démarches pour comprendre, situer et positionner ce que peut le design pris dans une telle perspective ?
Comment amorcer un travail commun ? Comment se présenter à l'« Autre » ? Comment ouvrir ? Comment ménager un premier espace de dialogue qui permettra l’émergence d’un espace de réflexion commun ? Il s'agira de réfléchir
sur les outils et les conditions de dialogue, ainsi que sur les cadres propices à la mise en pratique de ces outils. In fine, la question centrale sera comment s’y prendre pour que le design se constitue en agent de réciprocité ?
Probablement en co-réfléchissant et en co-construisant entièrement la démarche avec les personnes qui accepteront la proposition. Il s’agira donc ici de voir comment engager les premiers pas.

Responsables scientifiques : Fabienne Denoual (maître de conférences en design) ; Hakima Metahri (doctorante en design) ; Estelle Bottereau (designer)


Télécharger le programme de cette journée.